Le 13 août, le célèbre écrivain coréen Kim Un-Su a rencontré ses lecteurs à la librairie Modul Cărturești de Bucarest lors d’un événement littéraire exceptionnel consacré à son roman acclamé Les Planificateurs (The Plotters), traduit en roumain par Mihaela Sofonea et publié chez Paralela 45 sous le titre Complotiștii. L’événement a réuni un panel varié de voix issues de la littérature, de la traduction, du monde académique et de l’édition, qui se sont joints à l’auteur pour discuter de son œuvre, des défis de la traduction et de la réception de la littérature coréenne contemporaine à l’étranger.

Le roman met en scène Reseng, un orphelin élevé dans une librairie servant de couverture à un réseau d’assassins. Tueur professionnel, il commence à douter du sens de son existence et des règles invisibles qui dictent sa vie. Entre complots, trahisons et réflexions existentielles, Les Planificateurs dévoile un univers où la violence est organisée comme une mécanique froide et implacable, tout en questionnant la liberté individuelle face au destin.
Une étoile montante de la littérature coréenne
Né à Busan en 1972 et diplômé en littérature coréenne de l’université Kyung Hee, Kim Un-Su fait ses débuts en 2002 avec des nouvelles qui lui valent rapidement une reconnaissance critique. Son premier roman, Cabinet (2006), reçoit le prix Munhakdongne. La consécration internationale arrive avec The Plotters, publié en français sous le titre Les Planificateurs et finaliste du prestigieux Grand Prix de Littérature Policière. La traduction anglaise, parue en 2019, fut saluée par le New York Times Book Review comme « Editor’s Pick » et figurait parmi les meilleurs thrillers d’hiver 2018/2019 selon le Chicago Review of Books.

L’écriture de Kim explore la solitude, la violence et les mécanismes invisibles du pouvoir. Ses romans révèlent les zones d’ombre de la société en mêlant suspense, ironie et commentaire social aigu. Plusieurs de ses œuvres connaissent déjà des adaptations à l’écran : Les Planificateurs est en cours de production comme long-métrage, tandis que Hot Blood est déjà sorti en salles, plongeant le spectateur dans les bas-fonds urbains de la Corée.
La rencontre de Bucarest

L’événement de Bucarest a réuni un public local et international, reflet du dialogue interculturel propre à la littérature traduite. Aux côtés de l’auteur et de sa traductrice Mihaela Sofonea, le panel comptait Tatiana Mironov (directrice de l’Association HOP&RATS), Pierre Bisiou (éditeur français et fondateur de Matin Calme, maison spécialisée dans le polar coréen), Bogdan Tănase (enseignant à l’Université de Bucarest) et Laura Văceanu (professeure de littérature asiatique et présidente de la Société de haïku de Constanța). La discussion fut animée par Cătălina Bălan, directrice marketing et communication de Paralela 45.
Les débats ont porté sur la traduction et la réception de Les Planificateurs, tout en élargissant la réflexion sur la place croissante de la littérature coréenne contemporaine sur le marché mondial. La soirée s’est conclue par une séance de dédicaces, permettant aux lecteurs roumains de repartir avec un exemplaire signé.
Une lecture personnelle

L’une des phrases qui m’a le plus marquée dans Les Planificateurs apparaît dès le début, lorsque Reseng hésite à exécuter un assassinat : « Il ne savait pas pourquoi ce n’était pas le bon moment. Seulement qu’il existait un moment juste pour toute chose. »
Cette ligne, à la fois simple et troublante, capture l’atmosphère de tout le roman. Il ne s’agit pas seulement d’un tir différé : c’est l’illusion du contrôle. Cette phrase m’a fait réfléchir à la fréquence avec laquelle nous croyons agir librement, alors que le temps, les circonstances ou des forces invisibles déterminent nos gestes. Kim installe ainsi une intrigue qui parle moins de la violence elle-même que des structures invisibles qui la régissent.
L’attrait mondial de la littérature coréenne

De tels événements soulignent une tendance grandissante : la littérature coréenne séduit désormais un public international comme jamais auparavant. De La Végétarienne de Han Kang à Kim Jiyoung, née en 1982 de Cho Nam-Joo, les œuvres coréennes sont traduites dans des dizaines de langues et rencontrent un lectorat enthousiaste à travers le monde. Le succès de Kim s’inscrit dans cette vague : des récits profondément ancrés dans la société coréenne mais porteurs de thèmes universels comme l’identité, la morale ou la résistance.
La venue de Kim Un-Su en Roumanie illustre les passerelles que la littérature bâtit entre les cultures. La traduction ne se limite pas à rendre un texte accessible : elle invite les lecteurs du monde entier à découvrir d’autres voix, d’autres perspectives.

How about this article?
- Like0
- Support0
- Amazing2
- Sad0
- Curious0
- Insightful0