Si vous vous êtes déjà baladé dans Séoul, les noms tels que Dongdaemun Design Plaza et Namdaemun Market vous sont peut-être familiers. Ces lieux ne sont pas seulement populaires parmi les visiteurs ; ils font aussi référence à deux des quatre grandes portes historiques de la ville de Séoul.
Plongeons ensemble dans l'histoire fascinante de Bukdaemun, Namdaemun, Seodaemun et Dongdaemun.
Comprendre l'étymologie coréenne
En coréen, Buk, Nam, Seo et Dong font référence aux quatre points cardinaux, respectivement Nord, Sud, Est et Ouest.
Ainsi, on peut faire les liens suivants : Bukhansan est la "montagne au nord du fleuve Han" (han faisant référence au Fleuve Han qui traverse Séoul aujourd'hui, et san signifiant montagne) et Gangnam est le quartier au Sud du fleuve (gang signifiant le fleuve).
Quant à -daemun, on peut traduire ça par "Grande porte". Ces quatre grandes portes sont surnommées Sadaemun (Sa étant le chiffre sino-coréen pour quatre).
Bukdaemun est donc la grande porte du Nord, Namdaemun la grande porte du Sud, Seodaemun la grande porte de l'Ouest et Dongdaemun la grande porte de l'Est.
À noter que jusqu'à maintenant, je vous ai parlé des noms "directionnels" de ces quatre portes, mais elles ont aussi des noms officiels : Sukjeongmun (Bukdaemun), Sungnyemun (Namdaemun), Donuimun (Seodaemun) et Heunginjimun (Dongdaemun).
(de gauche à droite : Bukdaemun (© GothPhil), Namdaemun (© Andy Eick), le mémorial de Seodaemun (source) et Dongdaemun (© Joel M) )
Bref historique des portes
Pendant la période Joseon (1392-1910), ces quatre portes étaient ouvertes et fermées chaque jour, et la capitale était composée de districts intérieurs (Sadaemun-an, littéralement à l'intérieur des quatre grandes portes) et de districts extérieurs.
Les portes ont été construites en concordance avec les Cinq Virtues du Confucianisme. Pour cela, il faut s'intéresser au Hanja (les charactères chinois anciennement utilisés dans l'écriture du coréen) mais dans un soucis de rendre cet article lisible, je vais faciliter la compréhension.
Les Cinq Virtues du Confusionisme sont les suivantes :
① Intégrité ou fiabilité (sin, 신, 信)
② Discernement ou connaissance (ji, 지, 智)
③ Bienséance rituelle ou étiquette (ye, 예, 禮)
④ Droiture ou justice (ui, 의, 義)
⑤ Bienveillance ou humanité (in, 인, 仁)
Lorsqu'on regarde attentivement la syllabe associée à chaque virtue et le nom officiel des portes, on peut rapidement faire le rapprochement. Bukdaemun (Sukjeongmun) représente la connaissance, Namdaemun (Sungnyemun) est la bienséance rituelle, Seodaemun (Donuimun) est la droiture, quant à Dongdaemun (Heunginjimun), il s'agit de la bienveillance.
Quant à la dernière, l'intégrité, elle est représentée par Bosingak, le pavillon contenant la cloche qui sonnait 33 fois à quatre heure du matin et à dix heures du soir pour rythmer l'ouverture et la fermeture des portes de la ville.
Toutes les portes ont été construites entre 1396 et 1398, et parmi les quatre seules trois sont encore debout aujourd'hui. Dongdaemun est la seule porte qui n'a pas connu de dommages lourds et a été restaurée en 1869. Bukdaemun et Namdaemun ont toutes les deux ont été victimes d'incendies mais ont été reconstruites respectivement en 1976 et en 2013. Quant à Seodaemun, un mémorial existe actuellement à son emplacement, mais la mairie de Séoul a annoncé en janvier 2024 qu'elle avait pour projet de la faire reconstruire. (source).
(Dans l'ordre : Bukdaemun (© Rutgers), Namdaemun circa 1930 (source), Seodaemun circa 1904 (© Horace Grant Underwood), Dongdaemun circa 1930 (source) )
Maintenant que nous avons en tête un peu de contexte historique et culturel, examinons comment ces portes étaient disposées dans la ville et ce que cela nous révèle sur l'ancienne Séoul.
Cartographie des portes
Vous pouvez voir ici une carte de la ville de Séoul (à l'époque se dénommant Hanyang) datant de 1861 (ce qui correspond à la période Joseon dont nous avons parlé plus tôt). Nous pouvons voir les quatre grandes portes aux quatre points cardinaux de la ville, mais également agrémentées de quatre "petites portes" qui correspondent aux points cardinaux intermédiaires (nord-ouest, nord-est, sud-est, sud-ouest).
Une de ces petites portes, Changuimun, recèle une curiosité artistique et culturelle. Sur le plafond voûté de la porte, on trouve une gravure représentant un phénix. Toutefois, une expression populaire prétend qu'il ne s'agit pas de phénix, mais de poulets. Cette représentation insolite trouve son explication dans la topographie environnante : le paysage extérieur à cette porte évoque un mille-pattes, et les poulets, ennemis naturels des mille-pattes, auraient été gravés là pour maintenir l'équilibre de la topographie locale. À titre de comparaison, sur les portes de Namdaemun et de Gwanghuimun (une petite porte), c'est un dragon qui est peint sur les plafonds.
Ci-dessous, vous trouverez une carte moderne de Séoul où l'ancien centre historique est approximativement démarqué, vous permettant de visualiser l'emplacement des portes historiques par rapport à la ville telle qu'elle est aujourd'hui.
On peut d'ailleurs voir que le cours d'eau qui traversait Séoul à l'époque n'était pas le Fleuve Han, mais bien de Cheonggyecheon qui est aujourd'hui devenu une promenade relaxante au cœur de la capitale.
Les grandes portes de Séoul ne sont pas de simples repères géographiques, elles sont les piliers d'une histoire et d'une culture qui a façonné la capitale. J'espère que cet article vous aura apporté des anecdotes à partager sur la géographie historique de Séoul pour agrémenter votre prochain voyage !
Et si la curiosité vous a piquée, vous pourrez trouver ci-dessous une illustration qui vous donne une idée de la taille de la ville de Séoul au fil des décénies :
Sources pour l'article :
Wikipedia (The Eight Gates of Seoul), Wikipedia (Confucianisme)
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